Le Nystagmus

Définition du "nystagmus"

Le nystagmus est un tremblement des yeux inaptes à maintenir une fixation stable d’un objet et caractérisé par une succession de mouvements oculaires involontaires et rythmés. Il peut être horizontal, vertical ou plus rarement rotatoire. Le nystagmus n’est pas une maladie mais le symptôme d’un trouble du système oculomoteur. Il s'agit d'un trouble du développement de la fixation dans les premières semaines de la vie. Le nystagmus est déclenché par la fixation et aggravé par l’effort de fixation.

Le nystagmus est un signe d'appel qui doit motiver à lui seul une consultation ophtalmologique et un bilan pluridisciplinaire de l'enfant.
Chez le nourrisson et l'enfant de moins de 2 ans, on trouve :
- Des nystagmus d'origine oculaire, nystagmus précoce sensoriel (30 à 35 % des cas)
Du fait de la présence de lésions sévères de l'appareil visuel, il s'accompagne toujours d'une mauvaise vision. Parmi les principales causes citons l'albinisme dont le diagnostic n'est pas toujours évident lorsqu'il s'agit d'un albinisme partiel (uniquement oculaire), les cataractes congénitales, des lésions rétiniennes, cornéennes ou du nerf optique.

- Des nystagmus dits "idiopathiques" (20 à 25 % des cas)
L'absence de lésions patentes et la négativité du bilan neurologique font que la cause du nystagmus reste inexpliquée. Il s'agit en fait d'un diagnostic d'élimination.
Ces nystagmus isolés, apparus dans les premiers mois de la vie, peuvent être héréditaires dans certains cas.

- Des nystagmus d'origine neurologique
Dû à une pathologie anténatale, périnatale ou post natale grave du système nerveux central avec de lourdes séquelles visuelles et/ou neurologiques, c'est le nystagmus congénital neurosensoriel nécessitant une prise en charge neurologique et pédiatrique (IRM–Scanner).
Par ailleurs un nystagmus qui apparaît chez un nourrisson ou un enfant jusque là indemne en apparence, doit faire rechercher une lésion neurologique (tumeur…).

L'examen d'un enfant nystagmique

C’est un examen long et difficile. Le problème est différent selon l'âge de l'enfant lors de la première consultation. Le contexte périnatal, les antécédents familiaux, la date d'apparition du nystagmus, la recherche d'une anomalie ou d'une malformation oculaire nécessiteront un bilan clinique et neuroradiologique ainsi qu'un ERG (électrorétinogramme) et un PEV (potentiel évoqué visuel) éventuellement.

1) L'acuité visuelle dépend de l'importance du nystagmus mais sa seule présence entraîne inévitablement une mauvaise acuité visuelle de loin, la vision étant meilleure de près et souvent aussi les deux yeux ouverts. Cependant, la vision du meilleur œil ne dépasse pas le plus souvent 4 à 6/10. La vision du relief (vision stéréoscopique) est toujours médiocre.

2) Un strabisme peut être associé (divergent : 30%, convergent : 70%). Il existe dans la majorité de ces cas une amblyopie parfois profonde de l'œil dominé nécessitant un traitement médical urgent et souvent difficile. Le rôle de l’orthoptiste est important dans l’étude des anomalies oculomotrices et de la vision binoculaire.

3) L'examen va permettre d'observer un éventuel torticolis de la tête, dit "position de compensation" dans laquelle l’acuité visuelle est meilleure que dans le regard de face par diminution de l’amplitude du mouvement nystagmique (gain parfois de 2 à 3/10 ce qui n’est pas négligeable dans les basses acuités). Le torticolis est souvent horizontal, tête tournée à droite pour regard des yeux vers la gauche, ou tête tournée à gauche pour regard des yeux vers la droite. Mais il existe aussi des positions de blocage tête renversée en arrière et/ou en inclinaison ou tête penchée en avant et regard en haut, positions très inconfortables pouvant entraîner des troubles de la statique vertébrale. Dans certains cas, la position de meilleur confort visuel peut être différente pour la vision de loin et la vision de près.

Cette position de la tête en torticolis utilisée par l’enfant devant la télé et au tableau peut alerter la famille et doit donc être signalée à l’enseignant qui placera l’enfant au 1er rang à gauche ou à droite de manière à ce que le tableau soit dans son champ de meilleure vision.

4) Les troubles de la réfraction, myopie, astigmatisme, hypermétropie, sont fréquents et il faut les rechercher systématiquement, en particulier l’astigmatisme (environ 70%) et il faut toujours les corriger le plus soigneusement possible. Il existe cependant quelques enfants nystagmiques qui n’ont pas besoin de lunettes malgré leur mauvaise vision et cela est souvent difficile à faire comprendre à leurs éducateurs.

5) La vision des couleurs sera systématiquement explorée dans le nystagmus congénital car cet examen peut révéler une achromatopsie totale, souvent méconnue.

En pratique

Si le nystagmus entraîne une malvoyance de loin (de 1 à 5/10), la vision de près est le plus souvent meilleure (sauf pathologie oculaire associée type cataracte ou lésion rétinienne) et une scolarité normale peut être envisagée.
L’effort physique (course, jeux de ballon, gymnastique, montée d’un escalier …) augmente la rapidité et l’amplitude du nystagmus de telle sorte qu’après la récréation ou le cours d’éducation physique les enfants nystagmiques accusent une baisse d’acuité visuelle qui peut durer jusqu’à ½ heure. C’est là une situation qu’il faut aussi signaler à l’enseignant.
Une photophobie est toujours présente en cas d’albinisme ou d’achromatopsie et plus ou moins fréquente dans les autres cas.

En raison de la mauvaise acuité visuelle de loin, le permis de conduire sera très rarement possible (il faut 6/10 du meilleur œil en monoculaire). C’est un problème important pour les adolescents et il vaut mieux que les parents en soient informés.
Il faut savoir également qu’un minimum de 4 ou 6/10 du meilleur œil peut être exigé pour être admis dans certaines grandes écoles ou pour être titularisé dans certaines administrations.
L’orientation professionnelle devra tenir compte du handicap visuel, sachant que celui-ci est stable et ne s’aggrave pas avec l’âge en dehors d'une pathologie associée.

Le traitement

Il n’y a pas à proprement parler de traitement médical du nystagmus. Des essais médicamenteux ont été tentés mais ils n’ont pas prouvé leur efficacité.
Devant une amblyopie profonde de l'œil dominé, en raison de l’augmentation de l’amplitude du nystagmus à l’occlusion d’un œil, il est préférable de limiter les périodes d’occlusion du meilleur œil et de préférer les pénalisations optiques.
En cas de strabisme associé, une intervention chirurgicale sera peut-être nécessaire pour réduire la déviation strabique.
En cas de torticolis avec une position nette de blocage du nystagmus, la prescription de verres prismatiques ou une chirurgie particulière de translation des muscles oculaires peuvent être envisagées pour recentrer la position privilégiée des yeux en position de face.
L’enfant nystagmique a une mauvaise accommodation ce qui provoque en classe une difficulté et une certaine lenteur pour passer de la vision de loin à la vision de près. Les verres double foyers l’aident souvent considérablement pour la lecture et l'écriture.
La correction par lentilles de contact peut également apporter un meilleur confort visuel et parfois un gain d’acuité.
Des verres ou des lentilles teintés sont conseillés chez l’enfant albinos ou atteint d'achromatopsie pour atténuer la photophobie.

Conclusion

Le traitement précoce d'une cause éventuelle oculaire ou neurologique, la prescription de lunettes avec ou sans prismes, avec ou sans double foyers pour traiter les anomalies de réfraction, la lutte contre l'amblyopie de l’œil dominé, la chirurgie du strabisme et du torticolis permettront d'obtenir un plus grand confort visuel et une amélioration de la statique vertébrale.
La prise en charge des enfants nystagmiques doit de toutes façons être pluridisciplinaire : c'est le travail de toute une équipe, mobilisée pour amener l'enfant à une scolarité normale et à un projet professionnel conforme à ses désirs.

Voir aussi : myopie, hypermétropie, astigmatisme, strabisme, amblyopie